Dans un tourbillon nord-est, l' anticyclone des Açores lance un courant d' air en direction des Canaries alors que les alizés secs et chauds de l' Afrique se chargent de l' humidité de l' Atlantique. Les nuages ainsi formés butent à vive allure contre les montagnes de Tenerife. A 1000 mètres, point d' inversion de la température, la condensation se produit... et il pleut sans qu' une seule goutte ne tombe sur le sol.

Cette masse d' air humide dans laquelle on ne voit guère à plus de cinq mètres et qui s' étiole soudainement au Pico del Inglés à 1024 mètres est un spectacle saisissant de la Nature. Voir pour le croire ne suffit pas, il faut toucher pour être convaincu.

Quelques lichens sont à portée de main; pressés de la main, ils dégorgent des cascades d' eau comme une éponge. Il y a une parfaite symbiose entre tous les éléments dans cette forêt de feuillus permanents où la bruyère arborescente domine. Cette formation végétale de l' ère tertiaire ne se trouve qu' à Tenerife.

Un peu plus haut au nord de l' île, les pins canariens au bois si dur qu' il est imputrescible ont dû développer trois aiguilles d' une longueur de 30 centimètres environ au lieu des deux habituelles pour mieux capter l' humidité.

Au sud de Tenerife, du Teide à 3918 mètres jusqu' au bord de la mer avec ses kilomètres de plage, la roche volcanique reste quasiment désertique. Il n' y a plus de nuages, ni d' averses horizontales ou verticales.

A Tenerife, on adore le contraste et les touristes... surtout ceux qui ne viennent pas ici pour bronzer idiot.

Claude-Yves Reymond